
De manière générale, un port maritime d’un pays est une porte d’entrées et de sorties de marchandises de ce pays ainsi que celles des pays n’ayant pas accès à la mer, après sollicitation de ces derniers.
Comment la RDC, un pays ayant accès à l’océan Atlantique, peut-elle permettre l’évacuation de ses minerais stratégiques via le port d’un autre pays également bordé par l’Atlantique ?
La côte d’Ivoire, pourrait-elle accepter d’acheminer le cacao produit sur son sol vers l’Atlantique via le port de Monrovia au Liberia, plutôt que par son propre port d’Abidjan ? Signalons par ailleurs que l’économie Angolaise repose principalement sur l’exploitation et l’exportation du pétrole et des diamants, et ne produit aucune tonne de cobalt ni de cuivre.
Les Etats-Unis et l’Europe sous-estiment les congolais en envisageant de réhabiliter le corridor ferroviaire de Lobito construit à l’époque coloniale sans les consulter au préalable, répétant ainsi l’erreur historique de ne pas avoir pris en compte l’avis des Congolais lors de la construction initiale de cette voie ferrée.
Aujourd’hui, les temps ont changés. Les congolais ne sont plus dupes et s’opposeront avec la plus grande fermeté et détermination à cette démarche frustrante et porteuse de germes de conflit. Ainsi, puisque les Etats-Unis et l’Europe cherchent à agir sans la République Démocratique du Congo, la RDC doit rappeler à tous qu’elle est en position de force et qu’il lui revient de dicter les règles et d’établir les limites de chacun.
Par conséquent, pour pousser les Américains et les Européens à abandonner le corridor de Lobito au profit de celui de Banana, il est pertinent que le parlement congolais intègre dans le Code minier un article stipulant que l’exportation de minerais stratégiques produits en RDC vers la côte Ouest africaine ne peut se faire que via les ports de la République Démocratique du Congo.
L’urgence de la révision du code minier pour inclure l’article susmentionné s’impose, car elle vise à démontrer que le corridor de Lobito n’a aucune valeur sans le transport des minerais congolais (cobalt, cuivre, manganèse, zinc).
Ainsi, cette loi a pour principal avantage de positionner le port en eau profonde de Banana comme un Hub logistique incontournable et le plus important de la région, surpassant les ports de Pointe-Noire au Congo Brazzaville et de Lobito en Angola. Contrairement à ces derniers, qui se concentrent uniquement sur l’exportation de pétrole, le port de Banana expédiera également les minerais issu du grand Katanga voir même les minerais de l’Est, c’est-à-dire le coltan et la cassitérite.
Pendant que les États-Unis s’emploient à relancer le corridor de Lobito, la Chine, de son côté, a signé à Pékin le 4 septembre 2024 un contrat avec la Zambie et la Tanzanie pour la modernisation du corridor appelé TAZARA. Ce corridor relie la ville de Kapiri-Mposhi en Zambie au port de Dar-es-Salaam en Tanzanie et s’étend sur 1 860 km. Face à ces enjeux, les autorités congolaises doivent s’investir dans une diplomatie robuste, visant à présenter aux Américains et aux Chinois un projet clair incitatif et rassurant pour toutes les parties.
Les grandes puissances cherchent toujours à sécuriser et contrôler leurs voies d’approvisionnement en matières premières. Ainsi, les routes menant vers l’Ouest africain sont cruciales pour les Occidentaux, tandis que celles menant vers l’Est africain le sont pour la Chine. Pour éviter l’affrontement entre les deux superpuissances, les autorités congolaises devraient diviser le corridor de Banana en deux segments distincts. La construction, la réhabilitation et l’exploitation de la section allant du port de Banana à la ville de Kolwezi seraient confiées aux Américains et aux Européens, tandis que la section allant de Kolwezi à Sakania serait attribuée aux Chinois. Kolwezi, en tant que capitale mondiale du cobalt, ne serait donc pas un territoire exclusif à l’une des deux superpuissances. Au contraire, elle deviendrait une ville où les deux superpuissances pourraient accéder facilement et en toute sécurité.
RDC, lève-toi et défends tes intérêts stratégiques.
Eddy Tshikomba, Analyste indépendant
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